Xoïl – Loïc Lavenu. On n’a pas fini de parler de lui. Devenu tatoueur au tout début des années 90, Loïc Lavenu, alias Xoïl Needle, a compris sur le tard qu’il avait inventé son propre style de tatouage : le tatouage graphique. À 33 ans, ce tatoueur originaire de Montélimar et installé à Thonon les Bains est chouchouté par la presse internationale qui ne tarit pas d’éloges sur la finesse de son trait et sa créativité. Loïc, qui sera présent aux Festival International du Tatouage de Chaudes-Aigues, les 5, 6 et 7 juillet prochains, a pourtant longtemps galéré avant de s’imposer dans le métier qu’il aime.
Une boutique de Montélimar lui propose de le former au piercing, mais Loïc refuse : son truc à lui, c’est le tatouage. Problème : à cette époque, la branche n’est pas du tout développée en France. Pour les tatoueurs, c’est la débrouille, l’expérimentation dans son coin, parfois en contournant la loi. Chez lui, Loïc tente des choses, teste sa machine sur ses cuisses, encre la peau de quelques amis qui n’ont pas froid aux yeux. Il s’initie à la technique, reproduisant clandestinement les planches de flash qu’il se procure. Mais Montélimar ne lui offre pas les débouchés dont il rêve. Qu’à cela ne tienne,
Il tente sa chance ailleurs mais ne trouve pas de studio susceptible de l’accueillir. Tout logiquement, il commence à traîner et tatouer dans les squats, les lieux parallèles, la zone. Beaucoup d’alcool, beaucoup de drogue. Sa rencontre avec Patrick Chaudesaigues est alors déterminante. Le tatoueur remet Loïc d’aplomb, lui redonne du courage, partage avec lui son savoir-faire et joue des coudes pour lui trouver un studio. Au milieu des années 1990, Loïc s’installe au studio Art d’Corps de Chartres, un bon studio où il fait ses gammes. Mais le passé mauvais garçon de Loïc le rattrape dans cette ville située à une heure de Paris. Lui qui vient d’avoir un enfant veut s’éloigner de tout ça. Il part à la recherche d’une ville tranquille où installer son propre studio. Le voyage s’arrête à Thonon-les-Bains, sur le lac Léman.
Thonon offre à Loïc et sa famille les ingrédients qu’il sont venus chercher : du calme, un cadre agréable et une boutique à louer sur la place de la gare. Loïc y fonde Needle Side. Son nom de tatoueur, il le doit à une erreur sur sa première facture Internet où Loïc avait été écrit Xoïl. Xoïl essaie, chez Needle Side, de proposer à ses clients des tatouages propres, bien faits, à une époque où la plupart des tatoueurs travaillent encore aléatoirement. Niveau technique, il est au niveau, mais peine sur le plan créatif. Il se contente de modifier un peu les planches de flash à la demande de ses clients. Mais ces derniers en veulent davantage, le poussent du côté de la création pure. Pour un temps, c’est l’impasse.
Et puis Loïc découvre le travaille de Jef, basé à Bruxelles. Ses tattoos s’apparentent aux collages rock que Loïc réalisait dans sa jeunesse pour des disques auto-produits et des posters. Il y a là une voie à suivre. Au même moment, Loïc découvre Photoshop et s’y essaie. De ces deux influences vont naître un nouveau style, le style graphique, dont Xoïl va être l’un des précurseurs. Ironie du sort, c’est l’un de ses apprentis qui le forment à utiliser le logiciel. Loïc consacrera un an de sa vie à cette extension numérique de son travail. Ce qu’il fabrique sur l’écran lui plaît ; il commence à proposer à ses clients ses propres motifs, nés de ses expérimentations et présente sur le net son travail sous l’appellation « Photoshop » La presse s’empare de l’expression et recouvre le travail de Xoïl sous le nom de Photoshop Tattoo.
Malgré ce succès évident, Loïc continue de douter. Rien ne lui fait plus peur qu’une carte blanche. Il a besoin qu’on lui fournisse des directions, quelques pistes, pas un projet complet. Le client apporte ses idées et Xoïl les traduit en les intégrant à sa propre vision. Cet espace de liberté accueille sa marge créative. Laquelle n’est pas seulement générée par l’informatique. Pour Loïc, Photoshop est un outil à partir duquel il peut donner vie à ses idées, mais ce n‘est pas au logiciel d’imposer ses propres vues.