Chaudesaigues et ses treize lettres, un chiffre toujours évocateur. Ce 13 porteur d’une lourde symbolique et ce nom qui, en ce qui me concerne, est celui de mon père, celui de mes ancêtres, celui de notre village, en creusant au cœur des racines du nom… Chadasaygas.
J’ai avancé pas après pas, avec la puissance de ce lignage, son histoire mais surtout son mystère. Une histoire intimement liée à un territoire : celui du Caldaguès.
J’ai grandi avec l’espoir, un jour, de retrouver ces racines, mes racines. Le désir de construire moi aussi, d’écrire quelques pages à mon tour de cette histoire, pour servir ma famille et rendre hommage à mes ancêtres.
Je me suis construit enfant, en regardant ce point sur cette carte de France, qui symbolisait le lieu de mes racines, le départ, la source de mes origines.
Si j’attache de l’importance au nom, celui du père, c’est sans doute qu’il est fondamentalement identitaire, rattaché à des valeurs, celles de la famille, mais aussi celles de la montagne et du monde rural qui donnent ce sentiment d’être ancré dans la roche, dans la terre…. De ne plus pouvoir être déraciné.
Le métier que j’exerce, tatoueur, est lui aussi tout en symbolique, chargé d’un lourd passé et, malheureusement encore souvent dans notre société, associé à la criminalité.
Je l’ai choisi certainement de façon inconsciente, mais les années m’ont révélé l’importance, la puissance d’un tel acte. Un acte qui, de façon tribale, presque atavique, reste celui d’un rituel, d’un passage qui, encore une fois, dans notre société, reste transgressif.
Cette marque, cette trace encrée sur le corps, ce souvenir que laisse un tatouage est, à mes yeux, tout aussi identitaire. C’est sans doute ce qui me porte, m’anime, me nourrit et m’aide à avancer, sans renoncer, malgré les difficultés ou les obstacles du quotidien. Il n’est pas possible de tricher, mentir, duper ou tromper, quand il est question de ses racines, de son nom, de son identité. Comme il n’est pas facile de construire un tel événement, dans un petit village peuplé de 900 âmes. Une petite cité qui rassemble, pour l’année passée, quand même plus de 12 000 festivaliers.
Je suis fier de ce qui se passe ici, d’apprécier et de découvrir un peu plus chaque jour les Caldaguès. Fier aussi de montrer à mes enfants et à mes proches qu’il est parfois nécessaire, voire vital, d’aller au bout de ses rêves.
Nous laissons tous une trace de nos actions, de notre passage, un souvenir dans la mémoire. Cette réminiscence du passé qui peut nous conforter dans nos choix, celui de nos proches, qui peut nous porter vers l’avenir et laisser comme un témoignage. Je suis heureux qu’en ce premier week-end de juillet, ici à Chaudes-Aigues et pour la cinquième édition de notre festival, nous nous retrouvions pour célébrer nos passions communes.
Merci à vous tous, confrères et amis, voisins, élus ou commerçants, visiteurs, passionnés ou simples curieux, bénévoles, partenaires financiers. Merci même à nos détracteurs. Je ne pourrais décemment pas remercier Cécile, mon épouse, un merci ne représenterait rien. De la même façon qu’il n’y aurait pas de Festival sans son implication, son dévouement et son investissement, son amour.
Il y a des choses que l’argent n’achète pas, des choses qui se méritent. Il faut souvent tout donner sans trop attendre, mais je sais qu’il se passe quelque chose ici. Sans aucun doute ce qui ressemble le plus à des retrouvailles, celles d’une grande famille, cette famille que l’on peut décider de choisir, ou même de se construire.
C’est ce que j’associe à une immense cousinade, et cela me réconforte et me rassure, dans un monde qui souffre ou qui semble malade d’une forme chronique d’indifférence.
Il y a encore des endroits où il fait bon vivre et se retrouver ; Chaudes-Aigues est bien ce lieu, ce point sur la carte de France que je déployais avec mes petits bras, il y quarante-quatre ans.
Je vous souhaite de passer un excellent festival.
Photos : Thierry Marsilhac